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Doctrine Malikite

Au Nom de Dieu le Clément, Miséricordieux



Le Prophète (paix et salut sur lui) dit : « Chercher la science est une obligation pour chaque musulman ».

Il dit aussi : « les Anges étendent leurs ailes à celui qui cherche la science : par satisfaction de ce qu'il fait ».

Et il dit : «Certes, Allah, et Ses anges, les habitants des cieux et de la terre, jusqu'à la fourmi dans sa tanière et jusqu'au poisson prient pour celui qui enseigne aux gens le bien ».

Qu’Allah fasse de ce Forum une aumône courante pour Sa Face généreuse.

Que nos intentions soient purement pour Allah seul.

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Meilleurs articles sur le Coran à l'occasion de notre concours du mois de Ramadan

Mercredi 23 Juillet 2014

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Salam 'alaykum

A l’occasion du mois béni du Ramadan le mois du Coran par excellence, votre site doctrine-malikite (1er site de droit musulman malikite en français) a organisé le concours du meilleur article sur le Coran.

Ce concours a été proposé avec l’aimable partenariat des éditions IQRA (IqraFrance), les 4 Sources et Souk Ul Muslim.

La concurrence était difficile de part la haute qualité des articles et après arbitrage basé sur la pertinence scientifique et le respect des points qui ont été exigé pour l'article: nous avons l'honneur et le plaisir de vous annoncer les deux gagnants:

*1er prix: Monsieur Tahraoui Lyamine (L’équipe du journal al k@hf)

*2éme prix: Monsieur Souareba Gassama

Nous présentons nos félicitations aux gagnants. Puisse Allah les élever en degrés au service du Livre sacré et de cette belle religion.

Nous avons le plaisir et l'honneur de vous présenter ces deux articles précieux dans l'ordre:

1er Article:

بسم الله الرحمان الرحيم و الصلاة و السلام على رسول الله و آله و صحبه

I- Introduction aux sciences du Coran

L’Islam, tel qu’enseigné par le Prophète (paix et salut sur lui), trouve sa source dans la Révélation (wahy) que Dieu descendit (tanzil) par l’intermédiaire de l’Ange Gabriel sur Mohammed (paix et salut sur lui), et qui est consignée dans le Coran ou Qur’an qui signifie ‘lecture’, ‘récitation’. Livre Sacré des musulmans, le message coranique se définit avant tout comme une Guidée et une Miséricorde à destination de l’Humanité toute entière : Ô vous les hommes ! Une exhortation de votre Seigneur vous est venue, une guérison pour ce qui est dans les poitrines, un guide et une miséricorde pour les croyants [10;57] ; message qu’il est indispensable d’étudier si nous voulons en cerner l’esprit et en comprendre les objectifs. Pour un croyant, cette étude est une étape fondamentale dans son cheminement spirituel. Celle-ci vient en effet s’interposer entre la réception du Message et la mise en pratique de ses principes, pratique qui doit rester, dans la relation que nous entretenons avec le Texte, l’unique but recherché. Car si le Coran se lit et se relit, se psalmodie d’après des règles strictes (tajwid), se mémorise, s’écoute et se révise, sa lecture n’a de sens que si elle est empreinte de méditation. En effet, la recherche du sens des versets, au moyen de l’intelligence, du cœur et de l’esprit, augmente chez le croyant sa ferveur et le pousse à œuvrer : un Livre béni que Nous avons fait descendre vers toi, afin qu’ils méditent sur ses versets et que les doués d’intelligence réfléchissent !
L’œuvre et la réforme des individus, telles sont les fins visées par la Révélation. Or, force est de constater que depuis déjà bien longtemps les musulmans (en général) ont délaissé l’étude du Livre pour se concentrer uniquement, quand ils ne les ont pas aussi abandonnées, sur la mémorisation (hifz) et la récitation (tilawa). Aujourd’hui peut-être plus qu’hier, à l’heure de l’internet, des vidéos et des chaines satellitaires où l’on peut écouter des milliers de chouyoukhs dans toutes les lectures possibles sur un simple clic ou encore consulter le Coran sur un téléphone. Pourtant, qui parmi nous tente réellement d’écouter le Coran avec son cœur. Contraste poignant avec une époque lointaine et bénie, où posséder un mushaf était un luxe mais où la relation entre les croyants et leur Livre était profonde.
Ceci étant, l’étude que nous nous proposons de présenter ici n’a pas pour objet de traiter de manière exhaustive le thème des sciences Coraniques (‘ouloum al Qur’an) mais nous tenterons plutôt d’en présenter certains aspects d’une manière synthétique, dans le cadre qui nous a été « imposé ». Ainsi traiterons-nous des circonstances de la Révélation ou asbab an-nouzoul, des thèmes abordés par le Coran selon la période de révélation, mecquoise ou médinoise, du miracle coranique, des règles régissant son interprétation, de sa récitation (tilawa) et enfin des circonstances de sa compilation (jam’ al qur’an). Aussi, nous tenons à remercier les frères à l’origine de ce concours et demandons à Dieu de les récompenser grandement pour leur initiative en vue de réunir leurs frères sur le bien et de plaire ainsi -nous l’espérons- au Très Haut. Concurrencez donc dans les bonnes œuvres. C'est vers Allah qu'est votre retour à tous [5 ; 48].

II-Le miracle coranique :

Comme cela est rapporté dans la tradition musulmane, de nombreux prophètes furent envoyés avec des miracles et ce, afin de confirmer la véracité de leur propos. Devant ces miracles, les cœurs qui ont été touchés par la foi se raffermissent et se tranquillisent. Quant à ceux dont les poitrines se sont resserrées et ont rejeté le Message ; ceux-là même qui réclamaient des preuves, cela n’a fait qu’accroitre leur négation et ils n’ont pu opposer à l’indiscutable évidence qu’orgueil et mauvaise foi, attitude que le Coran a abhorré et illustré au travers d’un verset repris dans plusieurs histoires : ‘ceci n’est qu’une magie évidente !’. Ainsi, il fut donné à Salih la chamelle de Dieu, à Jésus il fut permis entre autre de guérir le lépreux et de ressusciter les morts avec la Permission du Très Haut, quant à Moïse il fut envoyé avec neuf prodiges vers Pharaon et son peuple. Les contemporains de Mohammad (paix et salut sur lui) furent aussi témoins de miracles comme cela est rapporté dans les Textes. Néanmoins, à la différence des autres prophètes pour lesquels les miracles de la Prophétie (mou’jizat) cessèrent après leur mort, il en subsiste un pour Mohammad (paix et salut sur lui). Il s’agit d’ailleurs du plus grand miracle, avec lequel il fut envoyé. Communément appelé i’jaz el qur’an, ce miracle est l’ultime miracle, le témoignage éternel pour l’Humanité de la véracité de sa mission (paix et salut sur lui), jusqu’au Jour Dernier.

L’aspect linguistique est sans doute l’un des aspects les plus probants du miracle coranique. Celui qui, un tant soit peu, bénéficie d’un minimum d’instruction en langue arabe, ne peut que constater la beauté de son discours. Étienne Dinet voit juste lorsqu’il fait remarquer : sûrement, ces bédouins illettrés de notre époque ne saisiront pas toujours le sens littéral des mots (le coran) récités par l’imam, mais le rythme, la cadence, l’harmonie des assonances qui animent les prodigieux versets… leur apporteront une explication peut-être imprécise mais véritablement conforme à l’esprit, et surtout incomparablement suggestive (La vie de Mohammad). Quant à celui qui est versé dans la connaissance de la langue, il ressentira avec force à quel point son langage, son style et son sens sont inégalés. Cela fut d’autant plus vrai à l’époque de la Révélation où le langage était un moyen de distinction et de concurrence entre les tribus. Les arabes, qui vouaient à leur langue une admiration sans limite, cherchaient sans cesse à se surpasser et à la purifier des imperfections et des lourdeurs du langage afin que celle-ci soit la plus limpide, la plus claire et la plus éloquente possible. Cette recherche d’un arabe pur (fousha) était un élément déterminant de leur identité et ceci est parfaitement illustré au travers des rencontres organisées dans les marchés où les poètes de toute l’Arabie s’affrontaient dans des concours de poésie pour la gloire de leur tribu. Certains poèmes de l’ère préislamique nous sont parvenus et témoignent du haut niveau de raffinement qu’avait atteint la poésie arabe de l’époque. Aussi les arabes furent-ils subjugués par la récitation du Coran car ils n’avaient jamais entendu de pareil discours. De nouveau, Étienne Dinet est bien à propos : quant à l’Arabe du hijaz, qui saisissait les nuances les plus subtiles du langage coranique, son propre langage, et qui recueillait les sourates des lèvres même de son compatriote (Mohammad), il était bouleversé par une si brusque surprise (idem). Toute la « magie » du Coran est d’adresser un message clair et profond, simple mais puissant, audible à tout homme au cœur sincère, quelle que soit sa langue, bien que révélé en arabe, dans un style unique et harmonieux favorisant sa mémorisation et sa récitation : Un Coran (en langue) arabe, dénué de tortuosité, afin qu’ils soient pieux [39;28]. En effet, Nous avons rendu le Coran facile pour la médiation. Y a-t-il quelqu’un pour réfléchir ? [54;22].
Le défi. Partant de cet état de fait, le Coran a lancé un défi aux Arabes, mais également d’une manière générale, à tous ceux qui se montrent sceptiques quant à la nature du message coranique : Si vous avez un doute sur ce que Nous avons révélé à Notre Serviteur, tâchez donc de produire une sourate semblable [2;23]. Ce défi qui n’a jamais été relevé est aussi une preuve de l’i’jaz. Cela était d’autant plus évident à l’époque du Prophète (paix et salut sur lui) que les notables mecquois, qui ne manquaient pas de nuire à l’Islam par tous les moyens, comptaient d’éminents poètes, ingénieux et renommés, maitrisant toutes les subtilités de la langue arabe. S’ils avaient pu éradiquer la toute jeune religion musulmane par ce moyen et mettre en doute la crédibilité du Prophète (paix et salut sur lui), ils auraient certainement relevé ce défi. Toutefois, rien ne fut entrepris en ce sens, tout simplement parce que cela leur était impossible : si vous n’y parvenez pas et, à coup sûr, vous n’y parviendrez jamais, parez-vous donc contre le feu qu’alimenteront les hommes et les pierres, lequel est réservé aux négateurs [2;24]. Ainsi, les hommes ne peuvent produire d’œuvre littéraire semblable au Coran et ils en seront toujours incapables comme l’a déclaré le Livre d’Allah : Dis : même si les hommes et les djinns s’unissaient pour produire quelque chose de semblable à ce Coran, ils ne sauraient produire rien de semblable, même s’ils se soutenaient les uns les autres [17;88].
Le prophète illettré
Nous savons que Mohammad (paix et bénédictions sur lui) était illettré, ce qui était d’ailleurs courant en Arabie à cette époque, l’illettrisme étant la règle et ceux qui connaissaient l’écriture faisaient office d’exception. Cependant, ce qui peut être considéré comme un manque pour le commun des mortels, est une qualité pour le Messager de Dieu (paix et bénédictions sur lui), car c’est une preuve que le Livre qu’il a « apporté » est une Révélation et non un livre forgé. Le Qor’an en a d’ailleurs fait un titre de noblesse en mentionnant Mohammed (paix et bénédictions sur lui), comme an-nabi al oummi’ : Ceux qui suivent le Messager, le Prophète illettré (oummi) qu’ils trouvent mentionné chez eux dans la Thora et l’Évangile… [7;157]. Il s’agit là d’un autre aspect de l’i’jaz qui est rappelé à maintes reprises dans le Coran, en réponse notamment à ceux qui, pour expliquer les nombreuses informations données par le Prophète (paix et bénédictions sur lui), sur les civilisations passées, sur l’histoire des prophètes ou encore sur l’invisible, affirmèrent que Mohammad paix et bénédictions sur lui, n’était pas illettré et avait étudié à l’insu de ses compatriotes. Autrement dit, ils insinuaient qu’il s’était instruit auprès d’érudits des Écritures Saintes puis qu’il s’était appuyé sur ce savoir afin d’innover dans la religion de Dieu, ce qui est clairement démenti au travers de nombreux versets : Et avant cela, tu ne récitais aucun livre et tu n’en écrivais aucun de ta main droite. Sinon, ceux qui nient la vérité auraient eu des doutes [29;48]. Et Nous savons parfaitement ce qu’ils disent : ‘Ce n’est qu’un être humain qui lui enseigne (le Coran)’. Or, la langue de celui auquel ils font allusion est étrangère (non arabe) et celle-ci est une langue arabe bien claire [16;103]. Hier comme aujourd’hui, on comprend que l’illettrisme du Prophète (paix et bénédictions sur lui), pose un problème aux détracteurs de l’Islam car s’ils acceptent cela il leur faut expliquer comment un homme appartenant à un peuple ne sachant ni lire ni écrire, qui n’était ni philosophe, ni historien, pas même poète et qui vivait dans une des régions les plus isolées du monde, loin des grandes capitales économiques et culturelles de l’époque, puisse du jour au lendemain réciter un Livre n’ayant nul pareil et qui allait bouleverser le cours de l’Histoire.
La révélation de l’invisible
Un autre aspect du miracle est contenu dans les prophéties révélées par le Coran et dans tout ce qui relève de l’invisible (ghayb) c’est-à-dire tout ce qui est caché et ne peut être connu de l’être humain comme le futur ou les pensées intimes d’une personne. L’exemple le plus évident est celui de la sourate les romains (30) qui prédit la victoire de ces derniers sur les perses quelques années après leur défaite. En effet, en 614 la ville de Jérusalem fut conquise par les Perses et seize ans plus tard en 630 les armées romaines menées par Héraclius furent comme annoncées par le Coran victorieuses des Perses : Alif-Lam-Mim. Les Romains ont été vaincus, dans le pays voisin/le plus bas, et après leur défaite ils seront les vainqueurs, dans quelques années. A Allah appartient le commandement, au début et à la fin, et ce jour-là les Croyants se réjouiront du secours d’Allah [30;1-5]. Il en est de même avec la prédiction de la victoire de l’Islam sur le polythéisme : C’est Lui qui a envoyé Son messager avec la guidée et la Religion de Vérité, pour la placer au-dessus de toute autre religion, en dépit de l’aversion des associateurs (mouchrikoun) [61;9], de la perdition d’Abou Lahab dans la sourate al massad [111], ou de l’annonce de la victoire proche à la Mecque (al fath) et l’entrée des musulmans en toute sécurité pour le pèlerinage [48;27], ou encore de la révélation des complots et des intentions des hypocrites (mounafiqoun). Toutes ces révélations et ces prophéties se sont confirmées ; d’autres, comme les grands signes de la fin des temps, attendent de se réaliser.
Le Coran et la science
On entend par cela le fait que le Livre comprend des informations sur la nature des choses, sur l’univers, etc., et que celles-ci ne contredisent pas l’expérience humaine, bien au contraire, elles se confirment et se confirmeront jusqu’à la fin des temps au fur et à mesure des découvertes scientifiques. Bien que le sujet ait été évoqué par les écoles classiques, il a surtout pris de l’ampleur avec l’essor de la science moderne au cours du XIXème et du XXème siècle. Parmi les exemples probants, nous pouvons citer entre autres les versets traitant de la formation du fœtus confirmés quatorze siècles plus tard par l’embryologie moderne [22;5], de même que le rôle déterminant de l’eau dans la formation de la vie : Ceux qui ont mécru, n’ont-ils pas vu que les cieux et la terre formaient une masse compacte ? Ensuite Nous les avons séparés et fait de l’eau toute chose vivante [21;30].
En conclusion, d’autres aspects pourraient être évoqués, d’aucuns font l’unanimité des savants, d’autres sont enclins à des divergences d’opinions. Néanmoins, si l’absence de contradiction entre le Coran et la science est une réalité et que certaines découvertes scientifiques se voient confirmées par certains versets révélés à un prophète illettré 13 ou 14 siècles plutôt, il convient de rester prudent et de ne pas tirer de conclusions hâtives car la science évolue sans cesse et les vérités d’hier sont parfois mises en branle par de nouvelles découvertes. Par ailleurs, l’aspect le plus important du miracle coranique reste qu’il n’existe pas de livre semblable au Coran et de guidée meilleure pour l’Humanité.



III-Les circonstances de la Révélation :

La période de Révélation
La Révélation peut être divisée en deux grandes périodes, avec pour point de repère la date d’émigration des musulmans de la Mecque vers Médine (al hijra) : la période pré-hégirienne, dite période mecquoise, qui débuta avec la première révélation et qui s’étala sur environ treize années et la période post-hégirienne, dite période médinoise, qui elle dura près de dix années et qui prit fin avec la mort du Prophète (paix et salut sur lui). L’avis le plus répandu parmi les savants est de considérer comme Mecquois ce qui a été révélé pendant la période mecquoise, même si cela n’a pas été révélé à la Mecque à proprement dit, comme pendant les voyages du Prophète (paix et salut sur lui) par exemple. De même, est considéré comme médinois ce qui a été révélé pendant la période médinoise même si cela n’a pas été révélé à Médine à proprement dit. Les ‘oulamas ont fournis beaucoup d’efforts afin d’établir des critères permettant de distinguer le mecquois du médinois. Cela constitue même un préalable fondamental à toute étude approfondie du Livre.

Les thèmes abordés selon la période
La différence entre Coran Mecquois (makki) et Coran Médinois (madani) se trouve au niveau des thèmes abordés. À la Mecque, tandis que les musulmans venaient d’embrasser la nouvelle religion et qu’ils étaient minoritaires et opprimés du fait de leur foi, la Révélation ne traitait que des fondements de la religion (oussoul din) : la foi en Dieu, l’éthique, le paradis, l’enfer, les histoires des communautés passées, le Jour dernier. À Médine, où les musulmans étaient enfin libres de pratiquer leur religion après treize années d’oppression à la Mecque, la Révélation reprendra les mêmes thèmes mais y ajoutera en plus les bases du droit musulman nécessaires à l’organisation d’une société musulmane et elle fixera le domaine du licite et de l’illicite. Cette différenciation est fondamentale dans l’exégèse car elle permet de contextualiser la Révélation.
Ainsi, la connaissance de la chronologie de la Révélation est de la plus haute importance pour contextualiser la mise en pratique des principes de l’Islam, pour comprendre l’application progressive de certaines prescriptions comme l’interdiction de l’alcool par exemple ou encore pour connaitre l’ordre des priorités dans la religion.

Une Révélation progressive
Le fait que la Révélation s’étala sur vingt-trois années revêt d’une grande sagesse, une Sagesse venant d’Allah. Plusieurs raisons expliquent cela. Entre autres, il s’agissait tout d’abord de rassurer le Prophète (paix et salut sur lui) et de le conforter tout au long de sa mission : Nous l’avons révélé ainsi (graduellement) pour raffermir ton cœur [29;32]. Ensuite, cela permettait de répondre aux questions et aux attaques des négateurs en ‘temps réel’, ce qui est bien plus efficace dans un débat d’idées. Une autre raison est que l’être humain a besoin de temps pour changer et se réformer. Aïcha, la mère des croyants, a bien exposé cela lorsqu’elle dit que si la Révélation avait commencé par les interdits, comme ne pas boire de vin ou ne pas commettre l’adultère, alors les gens auraient certes rejeté l’Islam [Al Boukhari]. Le changement ne peut jamais s’opérer de manière radicale.

Les causes de la Révélation
Les causes de la Révélation ou asbab an-nouzoul consistent à rechercher les circonstances dans lesquelles un verset fut révélé, autrement dit de répondre aux questions où, quand, comment, pourquoi ? Cette analyse met ainsi en lumière les causes et les implications d’une révélation et permet de définir un cadre pour l’exégèse. Car ce qui est crucial, c’est de savoir si un verset rattaché à un évènement historique particulier, a une application spécifique, limitée à une époque, à un contexte ou à un lieu, ou s’il peut s’appliquer dans d’autres situations voire s’appliquer en toutes circonstances. Pour illustrer la question d’asbab an-nouzoul prenons l’exemple du verset ’À Allah seul appartiennent l’Est et l’Ouest. Où que vous vous tourniez, Dieu est en face de vous, car Allah est Immense et Omniscient’ [2 ; 115]. Sans connaitre la cause de la révélation de ce verset, on pourrait penser qu’il n’est pas obligatoire de s’orienter vers la Mecque pour la prière, comme l’affirment pourtant d’autres versets ; Et d’où que tu sortes, tourne ton visage vers la Mosquée Sacrée [2;149]. C’est donc en cherchant après les causes de cette révélation que l’on en comprend ces implications : selon un avis, des musulmans voyagèrent par une nuit sombre et ne purent déterminer la direction de la Mecque pour prier. Plus tard, ils se rendirent compte qu’ils s’étaient trompés de direction et vinrent alors consulter le Prophète (paix et salut sur lui), suite à quoi le verset ci-dessus fut révélé. Ainsi, s’il est bien obligatoire de se diriger vers la Mecque pour prier, ce verset vient simplement nous apprendre que le fait de ne pas s’orienter dans cette direction par erreur ou par contrainte n’invalide pas la prière. À noter que les récits relatant les causes d’une révélation ne sont admis que s‘ils émanent des Compagnons du Messager (paix et salut sur lui), sachant qu’ils ont vécu au temps de la Révélation, ou bien de leurs disciples (tabi’oun) à la condition que ceux-ci soient reconnus pour leur science et leur honorabilité tels que les célèbres ‘Ikrima, Moujahid, Said Ibn Joubayr, Qatada, Masrouq, Hassan Al Basri ou Ibn Sirin

IV Les règles de l’interprétation coranique :

Le Coran est le Rappel et la Guidée de Dieu à l’Humanité. Il est aussi la première source de prescriptions dans l’Islam. Le but ultime de notre existence étant l’adoration de l’Unique, le Coran expose à l’Homme la manière dont cette adoration doit se concrétiser. Ainsi, le tafsir est la science permettant d’expliquer et de clarifier les règles, les principes et les objectifs du Livre. C’est la raison pour laquelle, comme l’a dit Ibn Kathir dans l’introduction de son tafsir : ‘cette science constitue une obligation [communautaire] dont les savants de l’Islam doivent s’acquitter’. Sans cela, un Coran sans exégèse ressemblerait à un mode d’emploi dans une langue que nous ne comprendrions qu’à moitié ! Allah prit, de ceux auxquels le Livre fut donné, cet engagement : Exposez-le, certes, aux gens et ne le cachez pas [3;187].

Préalables au tafsir :

En plus d’être profondément croyant (‘aquida salima) et d’avoir une bonne intention (niya saliha),l’exégète se devra, avant d’entamer son commentaire du Livre de Dieu, d’exceller dans toutes les sciences du Coran et d’avoir une connaissance approfondie de la langue arabe car le fait de parler sur Dieu sans savoir constitue l’un des plus grands péchés menant à l’égarement : [le diable] ne vous commande que le mal et la turpitude et de dire sur Allah ce que vous ne savez pas [2;169].Par crainte d’Allah, les compagnons avaient d’ailleurs tendance à éviter le tafsir sauf si cela s’avérait nécessaire.
Ainsi, l’exégète devra en premier lieu savoir situer tel ou tel verset par rapport à la chronologie de la Révélation (période mecquoise ou médinoise comme nous l’avons exposé plus haut). Il devra ensuite connaitre les circonstances de la révélation (asbab nouzoul) tout en sachant distinguer entre les récits fiables et ceux dont l’authenticité est douteuse.
Il devra également être capable de distinguer entre ce qui a une portée général (‘am) et une portée spécifique (khass), connaitre aussi les règles d’interprétation concernant les versets explicites (mouhkam) et les versets équivoques (moutachabih), savoir déterminer si un verset s’applique en tout temps et en tout lieu (moutlaq) ou s’il s’applique uniquement dans un contexte précis (mouqayyid).
Enfin, la connaissance de l’abrogeant et l’abrogé est fondamentale pour commenter le Coran. Les savants ont d’ailleurs dit qu’il était illicite (haram) pour une personne d’interpréter le Livre d’Allah dès lors qu’elle n’avait pas étudié cette science de manière approfondie. La connaissance de l’abrogation au sein du Coran fait référence aux versets du Livre qui ont été abrogés, c’est-à-dire dont l’application a été « annulée » par la révélation d’autres versets. Le Coran a expliqué ce concept dans le verset : Si Nous abrogeons un verset quelconque ou que Nous le fassions oublier, Nous en apportons un meilleur, ou un semblable. Ne sais-tu pas que Dieu est Omnipotent ? [2;106]. La raison principale de tout cela était d’apporter la nouvelle religion de manière progressive sans brusquer les choses. Un exemple bien connu est celui de la prohibition du khamr (tout ce qui trouble la raison : vin, drogues) survenue à l’issu de trois étapes : d’abord une mise en garde sans interdiction [2;219], puis une interdiction partielle au moment de la salat [4;43], enfin une interdiction totale abrogeant tout ce qui précède [5;90]. Le passage abrogé est appelé mansoukh et le passage abrogeant nâsikh. Comme pour asbab al nouzoul, seuls les récits fiables remontant aux compagnons et au Prophète (paix et salut sur lui) peuvent indiquer quels sont les versets abrogés.

Les sources du tafsir.
La première et la meilleure des sources pour interpréter le Coran est le Coran lui-même. L’exégète cherchera donc en premier lieu à expliquer un verset par un autre verset. Prenons par exemple le verset Nous l’avons (le Coran) fait descendre en une nuit bénie [44;3]. Quelle est donc cette nuit bénie ? La réponse se trouve dans la sourate 97 [1-5] : Nous l’avons certes, fait descendre (le Coran) pendant la nuit de la grande valeur (Al-Qadr)…durant celle-ci descendent les Anges ainsi que l’Esprit, par permission de leur Seigneur, pour tout ordre. Même chose avec le troisième verset de la Fatiha : Maître du Jour de la Rétribution. Dans de nombreux versets, nous pouvons trouver la description de ce Jour, entre autres : Le jour où aucune âme ne pourra rien en faveur d’une autre âme. Et ce jour-là, le commandement sera à Allah [82;17-19].
Vient ensuite l’explication du Messager de Dieu – paix et salut sur lui. Al Boukhari rapporte par exemple qu’une fois le Prophète – paix et salut sur lui - dit : celui à qui l’on demandera compte sera châtié. Aïcha lui demanda alors : Dieu n’a-t-il pas parlé de [celui qui] ‘sera soumis à un jugement facile’ [84;8] ? Le Messager – paix et salut sur lui - répondit : cela concerne la présentation [des œuvres] mais celui dont les comptes seront examinés dans le détail sera châtié.
Aussi, si aucune explication n’est trouvée dans le Livre ou dans la Sounnah, alors l’érudit aura recours à la parole des Compagnons – tels Ibn Abbas ou Ibn Mass’oud – puis à la parole des Suivants comme Moujahid, Ikrima, Al Dahak, Al Hassan Al Basri, etc.
Enfin, l’étude de la langue arabe classique et ancienne, au travers de la poésie préislamique notamment, permettra parfois de comprendre la signification de certains mots rares utilisés dans la Coran. On rapporte qu’Ibn Abbas ne savait pas ce que signifiait ‘fatirou samawati wa-l-ard [35;1] jusqu’à ce que deux bédouins se querellent devant lui au sujet d’un puits. C’est moi qui l’ai commencé (ana fatar-tou-ha) dit l’un d’eux. Autrement dit, Dieu est Celui qui commença la Création des cieux et de la terre.

Les types de tafsir.
On en distingue trois sortes : le tafsir bi-riwaya, le tafsir bi-ra’ay et le tafsir bi-ichara. Le tafsir bi-riwaya(par transmission) est constitué de toute explication du Coran que l’on peut remonter jusqu’à une source fiable (le Coran, le Prophète – paix et salut sur lui, un Compagnon). Celui-ci implique de connaitre la science des chaines de transmission (‘ilmar-riwaya) afin de s’écarter des récits non fiables (da’if).
Le tafsir bi-ra’ay (d’opinion) se base quant à lui sur un effort de réflexion. Pour la majorité des savants, il doit remplir certaines conditions pour être acceptable : entre autres, se baser sur ce que le Prophète – paix et salut sur lui - et ses compagnons ont dit, maîtriser la langue arabe, ne pas s’écarter des règles de l’Islam et ne pas aller au-delà du contenu du verset. Si les conditions ne sont pas remplies ou que le tafsir se base sur la seule opinion personnelle alors il sera rejeté. Par ailleurs, même accepté, il ne peut rivaliser avec le tafsir bi-riwaya.
Enfin, le tafsir bi-ichara s’intéresse aux sens plus subtils du Coran. Ce tafsir se trouve surtout chez les savants à tendance mystique (soufiya). Si l’on ne peut nier qu’Allah éclaire qui Il veut de Sa Science, comme ce serviteur dans sourate al kahf [18;65] qui possédait un savoir émanant de Dieu que le Prophète Moïse lui-même ignorait, il est vrai que ce tafsir ne s’appuie pas sur des preuves solides et certaines écoles l’ont donc rejeté. Toutefois, Ibn Al Qayyim le considère comme acceptable sous quatre conditions : l’absence de contradiction avec le sens apparent du verset, une signification authentique, une indication dans les termes du verset allant dans le sens de l’interprétation et une relation étroite entre l’interprétation et le sens apparent.


V- Les règles dans la récitation du Livre de Dieu :

Le Coran qui est la Parole de Dieu ne peut être lu à la manière d’un livre ordinaire. Allah, Exalté soit-Il, affirme que le Coran est une guidée et une guérison pour ceux qui croient [41;44].Or, pour que ces deux objectifs, que sont la guidée et la guérison, soient atteints, le croyant se doit d’observer lors de sa lecture certaines règles relatives la récitation (tilawa).
La bonne intention : Comme toute œuvre, il convient tout d’abord de placer dans notre cœur une intention saine en ne recherchant que la satisfaction de Dieu et la guidée auprès de Lui. L’affaire n’est pas simple car la routine, le manque de spiritualité, les péchés, le délaissement du Coran dont la reluire orne pourtant nos bibliothèques – un Coran ouvert machinalement, à l’occasion, parfois même une fois par an durant le Ramadan pour certains – tout ceci peut troubler la pureté de notre intention. Nous ne disons pas qu’une lecture du Coran même occasionnelle, sans compréhension ni méditation n’a aucun intérêt car comme l’a dit le Prophète (paix et salut sur lui) pour chaque lettre lue il nous sera inscrit une bonne action [Al Tirmidhi] ; de plus, le Très Haut, Exalté, a qualifié le Livre de guérison pour les poitrines et de miséricorde pour les croyants[10;57] à l’instar d’une jarre percée que l’on tremperait dans un fleuve : à défaut de se remplir et de retenir l’eau, la jarre en sortira au moins lavée de toute souillure ; mais nous disons juste que lire dans le seul but d’obtenir des « hassanets »- comme on l’entend souvent – est bien loin des objectifs voulus par le Coran et la Sounnah : un Livre béni que Nous avons fait descendre sur toi, afin qu’ils méditent le sens de ses versets et que les doués d’intelligence réfléchissent[38;29].Par ailleurs, nous devons aussi prendre garde à ce que l’ostentation ne se mêle pas à notre lecture. En effet, le Coran a une grande valeur dans le cœur des croyants et les gens ne sont jamais avares d’éloges vis-à-vis de celui qui lit le Livre avec une belle récitation. Nous devons donc interroger notre intention lorsque nous récitons afin d’embellir notre lecture pour Dieu et non pour les gens. L’homme par nature aime aussi souvent se mettre en avant et montrer ‘qu’il connaît’. En témoignent des anecdotes connues de tous comme pendant les prières du tarawih où les gens corrigent ‘tous en cœur’ la moindre erreur de l’imam sur les sourates finales tandis qu’ils étaient silencieux sur la quasi-totalité du Livre, ou bien celui qui, lorsqu’il guide la prière lit laborieusement des passages longs qu’il n’a pas assez révisés au lieu de réciter sereinement et avec dévotion des passages plus courts que nous considérons parfois à tort comme des ‘petites sourates’ tandis que la plus petite des sourates jouissait d’un immense prestige aux yeux du Prophète (paix et salut sur lui), etc. Nous demandons à Dieu qu’Il nous préserve !
Avant la récitation : Avant de lire le Coran, le musulman devra faire ses ablutions s’il décide d’ouvrir le Coran conformément à l’avis des quatre écoles sur la base du verset : seuls les purifiés le touchent [56;79]. S’il le récite de mémoire, sans toucher le Livre, les ablutions ne sont dans ce cas pas nécessaires mais restent malgré tout préférable. Il faudra aussi rechercher refuge auprès d’Allah contre le Diable avec la formule : a’oudhoubillah mina chaytani-rajim pour se conformer au commandement Divin : Lorsque tu lis le Coran, demande la protection d’Allah contre le Diable banni [16;98].
Bienséances : Quant aux bienséances, il y a entre autres le fait de psalmodier le Coran de sa plus belle voix - celui qui ne psalmodie pas le Coran de son mieux n’est pas des nôtres disait le Messager(paix et salut sur lui) [Abou Dawoud]- , le fait de réciter distinctement (tartil) afin de méditer - Et récite le Coran, lentement et clairement [73;4] – mais la récitation à vitesse normale (hadr) est autorisée – et enfin lire tant que possible avec les règles de récitation (tajwid) qui consistent pour l’essentiel à connaitre la prononciation correcte des lettres (makharij al hourouf wa sifat al hourouf),les règles du noun sakin et du tanwin , la règle de la résonance (qalqala),les règles du mim sakin , les règles du ra et du lam, les intonations (moudoud) et les arrêts dans la lecture (wouqouf). Ces règles, bien que strictes, ne sont pas si difficiles à assimiler dès lors que l’on est prêt à fournir un minimum d’effort. Enfin, d’aucuns ont consigné l’ensemble des règles relatives à la diction du Coran dans des poèmes comme l’imam Mohammed Ibn Al Jazari (751-833 H) avec sa célèbre jazariyya que beaucoup d’étudiants, désireux de mémoriser le Coran dans son entier, apprennent par cœur.
b[Les dix lectures] : Enfin, le coran doit être lu selon l’une des dix lectures (qira’at al ‘achra) c’est-à-dire celles dont la chaine de transmission remonte jusqu’au Prophète (paix et salut sur lui) et qui ont été authentifiées d’après le consensus des savants. Les lectures de Ibn ‘Ala (m.154H), Ibn Kathir(m.120H), Nafi’ (m. 169H), Ibn ‘Amir (m.118H),’Asim (m.128H), Hamza (m.156H), Al Kasa’i (m.189H)sont les sept lectures les plus authentiques car rapportées par de multiples voies (moutawatir). Les plus répandues à travers le monde musulman sont d’abord celle de ‘Assim transmise par l’imam Hafs puis celle de Nafi’ transmise par les imams Warch et Qaloun.

VI-Les étapes de la compilation du Coran:

L’étude de l’assemblage du Coran (jam’ al qour’an) permet de comprendre comment le Livre de Dieu fut préservé puis transmis fidèlement aux générations venues après la Révélation. En somme, comment le moushaf que nous détenons aujourd’hui entre nos mains est parvenu jusqu’à nous. La transmission et la préservation du Coran du temps du Prophète (paix et salut sur lui) se faisaient au travers de deux moyens que sont la transmission orale, basée sur la mémorisation du Texte (hifz), et la consignation par écrit des versets révélés, par l’intermédiaire de scribes officiellement assignés à cette tâche par le Messager (paix et salut sur lui).

La mémorisation.
Le Prophète (paix et salut sur lui) fut le premier à mémoriser la Révélation comme cela est mentionné dans le Coran : Ne te précipite pas pour réciter tout verset que Nous te révélons. Son assemblement dans ton cœur (sa fixation dans ta mémoire) Nous incombe, ainsi que la façon de le réciter. Donc, quand Nous le récitons, suis sa récitation. À Nous ensuite incombera son explication [75;16-19]. Nous te ferons réciter (le Coran), de sorte que tu n’oublieras que ce qu’Allah aura voulu [87;6-7]. Une fois qu’un verset ou une sourate était révélé, le Prophète (paix et salut sur lui) l’enseignait publiquement aux croyants et aux croyantes. De nombreux hadiths attestent qu’à la Mecque, dès les débuts de l’Islam, des compagnons récitaient les versets qu’ils avaient entendus de la bouche du Messager de Dieu (paix et salut sur lui). Nous pouvons citer à titre d’exemple le hadith dans lequel Abdallah ibn Mass’oud récita dans l’enceinte Sacrée la sourateLe Tout Miséricordieux afin que le Coran soit clairement entendu des notables mecquois, qui se ruèrent finalement sur lui et le passèrent à tabac. Les compagnons mémorisaient aussi des passages du Coran qui étaient récités plusieurs fois par le Prophète (paix et salut sur lui) au cours des prières quotidiennes. Il arrivait même que ce soient les compagnons qui récitassent le Coran à Mohammed (paix et salut sur lui) comme lorsque ce même Ibn Mass’oud psalmodia à la demande du Messager de Dieu (paix et salut sur lui) la sourate ‘les femmes’ jusqu’à ce que le Prophète (paix et salut sur lui) lui demanda de s’arrêter, les yeux débordants de larmes [Al Boukhari]. Par ailleurs, l’Envoyé d’Allah (paix et salut sur lui) encouragea fortement la mémorisation : le meilleur d’entre vous est celui qui a appris le Coran puis l’a enseigné [Al Boukhari] ; et mettait en garde contre le fait de délaisser la récitation : le familier du Coran est semblable au propriétaire d’une chamelle entravée. Si on ne relâche pas son attention on la gardera mais si on la néglige, elle s’échappera [Al Boukhari]. Mohammed (paix et salut sur lui) recommanda aussi quatre de ses compagnons pour l’apprentissage du Coran : prenez le Coran de quatre personnes : Abdallah Ibn mass’oud, Salim, Mou’adh et Oubay Ibn Ka’b [Al Boukhari].Il dépêcha également à Médine, avant l’émigration (hijra), Mouss’ab Ibn ‘Oumayr qui était surnommé le lecteur (qâri) et le chargea d’enseigner aux gens le Coran et les préceptes de l’Islam. Tous ces textes attestent que la mémorisation de la Révélation était répandue parmi les musulmans, et ce, dès le départ.

Le hadith d’Anas.
En outre, Anas Ibn Malik déclara que quatre compagnons réunirent (jama’a) le Coran dans sa totalité du vivant du Prophète (paix et salut sur lui), tous parmi les Ansars. Il s’agit de Oubay Ibn Ka’b, Mou’adh Ibn Jabal, Zayd Ibn Thabit et Abou Zayd [Al Boukhari]. Au vu de ce qui précède, ce hadith peut paraître surprenant car comme nous l’avons souligné, la mémorisation était encouragée et répandue, permettant une transmission par de nombreuses voies (tawatour). Sans compter qu’il ne figure dans cette liste aucun musulman mecquois (mouhajir) tandis que les quatre compagnons cités étaient tous Ansar, donc convertis à l’Islam plus de dix ans après le début de la Révélation. Cependant, les savants de l’Islam ont expliqué que ce hadith ne doit pas être compris comme étant exhaustif. En effet, le verbe jama’a peut avoir une signification plus vaste que la simple mémorisation. Plusieurs hypothèses ont été avancées. Nous retiendrons simplement qu’Anas n’a mentionné que les compagnons qu’il connaissait et dont il savait qu’ils avaient mémorisé entièrement le Livre de Dieu. Par ailleurs, Al Boukhari rapporte qu’Abou Bakr, après la mort du Prophète (paix et salut sur lui), entreprit l’assemblage du Coran suite aux guerres où de nombreux compagnons ayant mémorisé le Coran (houfaz) perdirent la vie, ce qui lui fit craindre que le Livre ne finisse par se perdre. Tout cela corrobore le fait que beaucoup parmi les disciples du Prophète (paix et salut sur lui) mémorisèrent le Coran en entier. Pour conclure, nous pouvons dire que le Livre fut préservé en partie ou en totalité dans la mémoire des croyants ou dans leurs cœurs dirons-nous plutôt.
Néanmoins, la transmission orale ne pouvait à elle seule garantir la préservation du message coranique. Il fallait pour cela un autre support : l’écriture. Ainsi, en plus d’être mémorisée par les croyants, la Révélation fut, dans le même temps, systématiquement consignée par écrit sur ordre du Prophète (paix et salut sur lui). En vérité c’est Nous qui avons fait descendre le Coran, et c’est Nous qui en sommes les gardiens [15;10].

La consignation par écrit
Comme nous l’avons déjà évoqué, l’essentiel des Arabes au temps du Prophète (paix et salut sur lui) était illettré. De la même façon, Mohammad (paix et salut sur lui) comme la majorité de ses compatriotes, ne savait ni lire ni écrire. La tradition arabe était alors véhiculée par voie orale, d’où l’importance donnée à la poésie et le caractère sacré conféré à la langue, que les Arabes s’évertuaient sans cesse d’embellir. Et si certains comme Waraqa Ibn Nawfal, pour ne citer que lui, connaissaient l’écriture, cela n’était pas le cas de la majorité. Néanmoins, le Prophète (paix et salut sur lui) dans un souci de sauvegarde du Coran, avait désigné des scribes qui avaient pour rôle de mettre par écrit les versets, au fur et à mesure des révélations. Parmi eux, on trouve le médinois Zayd ibn Thabit, l’un des plus illustres, qui sera chargé, comme nous le verrons, après la mort du Prophète (paix et salut sur lui) de l’assemblage du Coran. Al Bara rapporte ainsi que lorsque fut révélé le verset 95 de la sourate Al Nissa, le Prophète (paix et salut sur lui) dit : appelez-moi Zayd ; qu’il apporte la planchette, l’écritoire et l’omoplate. Puis il (paix et salut sur lui) lui dit : Ecris : Ceux d’entre les croyants qui demeurent chez eux… [Al Boukhari].
Aussi, de nombreux hadiths font état du Coran sous forme écrite du temps de la Révélation. Nous pouvons citer le hadith relatant la conversion d’Omar Ibn Al Khattab lorsque ce dernier, ayant appris la conversion de sa sœur, se rendit chez elle furieux, la violenta, puis pris de remords, lui demanda : laisse-moi voir ces feuilles que je t’ai entendu lire tout à l’heure pour que je puisse voir ce que Mohammad a apporté. Sa sœur lui objecta que seuls les purifiés peuvent toucher le Coran. Après quoi, Omar se lava puis se mit à lire les feuillets sur lesquels était écrite la sourate Ta Ha. Emerveillé par la beauté du discours coranique, il se convertit aussitôt à l’Islam. Dans un autre registre, on trouve aussi le hadith d’Ibn Omar où le Prophète (paix et salut sur lui) dit : Ne prends pas le Coran avec toi en voyage, car je crains qu’il ne tombe entre les mains de l’ennemi [Mouslim].Par ailleurs, la consignation du Coran se faisait sur différents supports : parchemins, peaux de bêtes, omoplates d’animaux, feuilles de palmier. L’ordre des versets dans une sourate était clairement défini par le Prophète (paix et salut sur lui) qui le tenait lui-même de l’Ange Gabriel, avec qui il révisait chaque année le Coran au cours du mois de Ramadan et même par deux fois l’année où il mourut. Ce dernier (paix et salut sur lui) avait l’habitude de dire lorsqu’il dictait un verset à l’un de ses copistes : Place ce verset dans la sourate où ceci et cela est mentionné. Cependant, si l’ordre des versets à l’intérieur des sourates était fixé, les feuilles comportant le Coran n’étaient pas encore, à la mort du Prophète (paix et salut sur lui), compilées en un même volume, mais étaient éparpillées sur divers matériaux. Ce travail d’assemblage et de compilation fut entrepris par le premier calife de l’Islam.

L’ordre d’Abou Bakr
Après la mort du Messager de Dieu (paix et salut sur lui) en 632, Abou Bakr devint le premier calife de l’Islam. Aussi, au cours de la bataille de Yamama en 633, de nombreux compagnons ayant mémorisé le Coran perdirent la vie. Omar Ibn al Khattab fit alors part au calife de sa crainte de voir de nombreux récitateurs du Coran (qourra’) mourir aux cours des batailles, à tel point que le Livre ne finisse par se perdre. Il insista fortement afin qu’Abou Bakr entreprenne la compilation du Coran. Celui-ci suivit son conseil et chargea Zayd Ibn Thabit, après l’avoir convaincu non sans difficultés du bien-fondé de cette idée, d’exécuter cette lourde tâche : ‘tu es un homme jeune, intelligent et nous avons pleine confiance en toi’ lui dit Abou Bakr. Tu as mis la Révélation par écrit pour l’envoyé de Dieu (paix et salut sur lui) ; cherche les fragments du Coran et assemble les diverses parties. Comment voulez-vous entreprendre (ndlr innover) une chose que le Prophète (paix et salut sur lui) lui-même n’a pas faite ? lui objecta Zayd. – Rien ne vaudra mieux que cette rédaction, répliqua le calife. Zayd conclut : après avoir essayé à maintes reprises de le faire revenir sur cette idée, Dieu fit se dissiper mes appréhensions et fit que j’adhère à ce projet [Al Boukhari]. Les diverses parties du Livre de Dieu furent alors rassemblées puis transcrites sur des feuillets (souhouf).Zayd a décrit ses recherches préalables à la compilation du Livre au travers du hadith rapporté dans le Sahih d’Al Boukhari : je commençais donc à chercher les fragments du Coran et à en rassembler les diverses parties d’après les feuillets, les omoplates, les branches de palmiers (utilisés comme supports pour inscrire la Révélation) et aussi d’après la mémoire des hommes. C’est ainsi que dans la sourate Le Repentir, je trouvais chez Khouzayma Al Ansari la trace écrite de ces deux versets que je n’avais trouvée chez aucun autre que lui (même si d’autres avaient par ailleurs mémorisé ces versets) : Certes, un Messager pris parmi vous, est venu à vous, auquel pèsent lourd les difficultés que vous subissez, qui est plein de sollicitude pour vous, qui est compatissant et miséricordieux envers les croyants. Alors, s’ils se détournent, dis : Allah me suffit. Il n’y a de divinité que Lui. En Lui je place ma confiance ; et Il est le Seigneur du Trône immense [9;128-129] Le recueil ainsi obtenu fut appelé moushaf et fut conservé chez Abou Bakr jusqu’à sa mort puis chez Omar, deuxième calife de l’Islam, et enfin chez Hafsa, fille d’Omar, que Dieu les agrée.

Les sept dialectes.
Après la mort de ’Omar Ibn Al Khattab, Othman Ibn ‘Affan fut chargé du califat. Au cours de celui-ci, des dissensions, imputables principalement aux nouveaux musulmans, se mirent à apparaître concernant la récitation du Coran. En effet, à cette époque, l’empire musulman en pleine expansion s’étendait bien au-delà de l’Arabie. Loin de la Mecque et de Médine, dans les territoires nouvellement conquis, les divergences concernant la récitation du Coran se multipliaient, au point où Houdayfa Ibn Al Yemen, compagnon du Prophète (paix et salut sur lui), vint à la rencontre du calife afin de l’avertir de ce qu’il avait entendu dans les nouvelles terres de l’Islam et lui recommander d’intervenir afin de préserver le dernier Livre des altérations et des divergences qu’avaient connues les anciennes révélations.
À quoi étaient dues ces différences ? La réponse se trouve dans le hadith du Prophète (paix et salut sur lui) : ce Coran m’a été révélé selon sept lettres [Al Boukhari & Mouslim]. En effet, à l’époque de la Révélation, afin de faciliter la compréhension et la mémorisation du Coran par le plus grand nombre, dont la majorité rappelons-le était illettrée, Dieu révéla au Prophète (paix et salut sur lui) Son Livre selon sept dialectes de la langue arabe (sab’a ahrouf). Les sept parlers concernés sont ceux des tribus Qouraych, Houdhayl, Thaqif, Hawazin, Kinana, Tamim et Yémen. Peut-être cela avait-il aussi pour but d’unifier les tribus autour de la Révélation de manière à ce qu’aucune d’entre elles ne se sente lésée ou à l’inverse s’enorgueillisse, d’entendre ou de ne pas entendre dans la Révélation des mots ou des expressions propres à son dialecte. Cela semble plausible si l’on considère la valeur que les Arabes donnaient à leur langue qui constituait, notamment via la poésie, un véritable outil de prestige et de distinction entre les tribus. Aussi, le Prophète (paix et salut sur lui) disait : (le Coran) a été révélé selon sept variantes. Employez celle qui vous est la plus commode [Al Boukhari]. Ainsi, d’une variante à l’autre, certains mots ou expressions pouvaient varier compte tenu des particularités de chaque dialecte mais avaient la même signification, ce qui ne changeait donc pas le sens général des versets. Un exemple peut être donné à travers le verset 5 la sourate 101 qui se lit ka-l-‘ihni-l-manfouch mais qui se lisait dans une autre version ka-soufi-l-manfouch, tous deux signifiant comme de la laine cardée. Ces différences de lecture ne concernaient qu’une partie mineure du Texte et ne posaient pas de problème du temps de la Révélation, mais cela se mit à changer dès lors que l’Islam s’étendit au-delà de l’Arabie. En effet, les nouveaux musulmans, parfois non arabes, ne comprenaient pas ces nuances, certains pensant que leur lecture était la seule authentique à l’exclusion des autres variantes.

La copie d’Othman ou moushaf al imam.
Les divergences devinrent de plus en plus prononcées sous le califat d’Othman. Inquiet de voir sa communauté se diviser autour de leur Livre à l’instar des communautés ayant précédé l’Islam, le calife Othman ordonna de réaliser des exemplaires du Coran à partir de la copie d’Abou Bakr. Pour cela, il mandata de nouveau Zayd Ibn Thabit mais aussi trois autres compagnons, leur demandant de rédiger un exemplaire de référence. D’après Al Boukhari, il s’agit de Abdallah Ibn Zabayr, Sa’id Ibn Al ‘As et Abderrahmane Ibn Al Harith Ibn Hisham. S’ils venaient à diverger sur un mot, le calife leur demanda de faire prévaloir le dialecte de Qouraych. Le dialecte de Qouraych était le parler le plus soutenu et le mieux compris de l’ensemble des Arabes ; mais il était surtout le parler dans lequel le Coran fut révélé originellement. La copie obtenue fut envoyée aux quatre coins du monde musulman. Tout autre exemplaire ou feuillet faisant référence à un autre dialecte fut brulé. C’est donc cette dernière version du Coran qui fut transmise génération après génération, jusqu’à nous parvenir. En vérité c'est Nous qui avons fait descendre le Coran, et c'est Nous qui en sommes gardien [15 ; 10]. Et Dieu est plus Savant !

L’équipe du journal al k@hf, mensuel de la mosquée Sahaba à Créteil (94000). http://www.alkahflejournal.com/

و الحمدلله الذي بنعمته تتم الصالحات
Mercredi 23 Juillet 2014

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