Pour montrer que l’invocation de Dieu « le Dhikr » est meilleure que tout autre acte de piété et de dévotion, on cite le Hadîth suivant rapporté par Abû ad-Dardâ’ selon lequel le Prophète (paix et salut sur lui) a dit : « Voulez-vous que je vous annonce quelles sont les meilleures de vos actions, les plus pures auprès de votre Seigneur, celles qui vous élèvent le plus en degré, et meilleures pour vous que de dépenser or et argent en aumône, et meilleurs pour vous que de rencontrer vos ennemis lors d’une bataille pour les tuer ou pour qu’ils vous tuent ? Ils répondirent : Oui. Certes. Il reprit : Eh bien c’est l’invocation de Dieu le Très-Haut. » Un homme demanda : l’invocation est elle meilleur que le Djihâd (la guerre sainte) ? Le prophète répond alors : « même si le mudjâhid (le combattant) frappe avec son épée jusqu’à ce qu’elle se brise et se remplie de sang l’invocateur restera toujours meilleur que lui. » [ Hadîth Sahîh, rapporté par Ibn Mâja et At-tirmithî]
Et Mu`âd Ibn Jabal (que Dieu l'agrée) a dit suite à ce Hadîth : « Il n’y a pas de chose qui éloigne du châtiment de Dieu autant que l’invocation de Dieu. ».[1]
Abd Allah Ibn ‘Abbâs (que Dieu l’agrée) dit « l’interprète du Coran »[2] [que Dieu l’agrée] dit : « Chaque fois que Dieu impose à son serviteur une Obligation, il donne à celle-ci une limite définie et il a excusé les personnes qui n'ont pas accompli cette obligation dans les cas de difficulté ou d'inaptitude, sauf pour le Dhikr, pour lequel Dieu n'a imposé aucune limite et pour lequel il n'a excusé personne s'il ne l'accomplit pas sauf s'il n'a pas ses facultés intellectuelles lui permettant d'être responsable de ses actes. Dieu a ordonné son invocation dans toutes les situations, c'est ce qui est dit dans le verset « ceux qui invoquent Dieu debout assis et couchés [3] », Dieu a dit aussi ' Ô croyants, invoquer Dieu abondamment » (c'est-à-dire :) nuit et jour en terre et en mer, en voyage ou chez vous, dans la richesse et la pauvreté, quand on est en bonne santé ou malade, secrètement ou ouvertement et dans toutes les situations. »
La pratique du Dhikr est à l'origine de toutes les stations spirituelles depuis celle de l'éveil (prise de conscience) jusqu'à celle de la réalisation de l'Unicité de dieu. Et c'est par les fruits du Dhikr que les novices (les aspirants à Dieu) obtiennent leurs connaissances et leurs états.
Il n'y a pas d'autre voie pour parvenir à cela sans le recours à l'arbre porteur du Dhikr. Chaque fois que cet arbre croit, ses racines s'enfoncent profondément, et par la même occasion, ses fruits et ses avantages s'amplifient. C'est-à-dire que si l'homme ne se réveille pas de son insouciance, il ne lui sera pas possible de traverser les étapes de son cheminement qui le conduira à la connaissance de Dieu et à Son adoration pour laquelle il a été créé.
Dieu dit: 'Je n'ai créé les djinns et les hommes que pour qu'ils M'adorent.' (Coran, 51/56)
Or, l'homme ne se réveillera qu'au moyen du dhikr, car l'insouciance c'est le sommeil du coeur ou sa mort même.
Le croyant invoque son Seigneur à tout instant. C'est alors que sa poitrine s'épanouit, que son coeur trouve son apaisement et que son âme s'élève plus haut. C'est parce qu'il éprouve le bonheur d'être auprès de son Seigneur.
'Les gens qui pratiquent Mon dhikr, sont assis auprès de Moi dans Mon assemblée.' (hadith qudsi cité par l'imam Ahmed)
'Quand vous aurez accompli la prière, invoquez le nom d'Allah, debout, assis ou couchés sur vos côtés.' (Coran, 4/103)
'Rappelle le nom de Ton Seigneur et consacre-toi totalement à Lui.' (Coran, 73/8)
Selon Abû Hurayra, l'Envoyé de Dieu a dit:
'Dieu a dit: 'Je suis auprès de Mon serviteur quand il Me mentionne et que Mon nom fait remuer ses lèvres.'' (cité par Ibn Mâja, Ibn Hayyân, l'imam Ahmad et al-Hâkim)
Et d'après 'Abd Allah Ibn Yassir, un homme a dit:
'O Envoyé de Dieu ! Les règles de l'islam deviennent de plus en plus nombreuses. Informe-moi donc, à laquelle dois-je le plus m'attacher ? Le Prophète (paix et salut sur lui) lui répondit:
- Que ta langue soit continuellement imprégnée de la mention de Dieu !'
(cité par Tirmidhi comme hadith hassan)
'Souvenez-vous de Moi et Je me souviendrai de vous.' (Cor., 2/152)
'Ceux qui ont cru et dont les coeurs se sont apaisent à l'évocation d'Allah.' (Cor., 13/28)
Le dhikr polit les coeurs et le débarrasse des péchés et de l'insouciance.
Selon Abû Mûsa al-Ash'ari, l'Envoyé de Dieu a dit: 'La dissemblance entre celui qui se rappelle de Dieu et celui qui ne s'en souviennent (celui qui pratique le dhikr et celui qui ne le pratique pas) s'apparente à celle du vivant par rapport au mort.' (cité par Bukhari)
D'après Abû ad-Dardâ, l'Envoyé de Dieu (paix et salut sur lui) a dit:
'Dieu fera ressusciter, le Jour de la Résurrection, des gens dont le visage sera illuminé. Ils seront installés sur des chaires de perles. Les autres envieront leur sort. Ce ne seront ni des Prophètes, ni des martyrs.'
Un bédouin s'agenouille alors et dit:
- O Envoyé de Dieu ! Décris-les pour nous les faire connaître.
- Ce sont ceux qui, de diverses tribus et de nombreux pays, s'aiment mutuellement en Dieu. Le dhikr les réunie (pour se souvenir de Dieu) et, à cet effet, ils L'invoquent.' (cité par Tabarani selon une bonne chaîne de garants)
Ibn 'Atâ Allah as-Sakandari (m. 709 h.) a dit: 'Le dhikr a comme sens: la délivrance de l'insouciance et de l'oubli, par l'éveil du coeur et sa présence permanente auprès de Dieu. Il est dit aussi que le dhikr est la répétition du Nom de Dieu (Allah), qu'il soit mentionné par le coeur ou par la langue, ou en répétant un de Ses Attributs ou une de Ses Prescriptions ou de Ses Actes, ou encore toute autre oeuvre qui rapproche de Dieu le Très-Haut.'
(in Miftâh al-falâh)
Ibn al-Qayyim al-Jawziyya : 'Il ne fait aucun doute que le coeur se rouille au même titre que le cuivre ou l'argent et les autres métaux. Son lustre se fait par le dhikr. Celui-ci le polit jusqu'à le transformer en un miroir immaculé. S'il est abandonné, il rouille, et quand il pratique le dhikr, le coeur retrouve son éclat.'
Or, deux éléments rouillent le coeur de l'individu: l'insouciance et le péché. Sa brillance se réalise par deux autres éléments: la demande de pardon (al istighfâr) et le dhikr.
'Lorsque un homme baigne dans l'insouciance, la plupart de son temps, la rouille s'accumule autour de son coeur, proportionnellement au degré de son indifférence. Et quand la rouille s'installe dans un coeur, la réalité des choses ne se perçoit pas comme il se doit par celui-ci.'
Enfin :
Cheykh Ibn 'Ata Illah d’Alexandrie dit :.
« N'abondonne pas l'invocation (Dhikr) pour la raison que pendant que ta langue mentionne Dieu ton coeur n'est pas présent. En effet, plus grave serait l'absence complète de la mention de Dieu que sa mention sans participation du coeur.
Peut être Dieu t'élévera-t'il de cette mention distraite à la mention avec concentration; puis à la mention avec présence du coeur; enfin à la mention avec absence de tout ce qui n'est pas le Mentionné. ' Et cela n'est guère difficile pour Dieu.' (Sourate 14 verset 20) »
Notes :
[1] Ce bas monde ainsi que tous ce qu’il contient est maudit, sauf l’invocation, ce qui s’y rattache et la science utile (pour celui qui l’apprend et celui qui l’enseigne), nous informe notre bien aimé Prophète (paix et salut sur lui) : Sunan At-tirmithî, le livre du Zuhd.
[2] En effet, le prophète (Bénédiction et salut sur lui) a dit d’Ibn ‘Abbâs (que Dieu l’agrée) qu’il était « l’interprète du coran » (turjumân al-qur’ân). Les explications que ce compagnon donne des versets du Coran font référence chez tous les savants musulmans. Ainsi, selon l’explication d’Ibn ‘Abbâs, « adorer Dieu » c’est connaître Dieu et on ne peut adorer ce que l’on ignore : la porte de la connaissance c’est donc l’invocation ‘Dhikr’. Certains savants musulmans ont précisé que cette connaissance de Dieu dont il est question dans le verset suivant : « Je n’ai créé les djinn et les êtres humains que pour qu’ils M’adorent », n’est pas la connaissance que l’on acquière à travers les livres et qui est généralement désignée par « sciences exotérique » (‘ilm al-zâhir), science intellectuelle, accessible par la raison. Au contraire, cette connaissance (ma’rifa), dit aussi « science ésotérique » (‘ilm al-bâtin), ou encore « science venant de Dieu » (‘ilm ladouni), est une science du cœur : donc accessible par l’invocation de Dieu et la compagnie des gens de l’invocation.
[3] 'Ceux qui invoquent Dieu, debout, assis, couchés et méditent sur la création des cieux et de la terre…' Sourate 3, versets: 190-191